Vainqueur à Lens (3-2) dans le choc de la 23e journée de Ligue 1, l’AS Monaco a acquis deux choses ce dimanche après-midi. Une place sur le podium du championnat de France, que le club avait abandonné après des résultats décevants, et des certitudes dans une nouvelle mise en place. Au terme d’un match d’une intensité assez folle, et d’un contenu extrêmement fourni, l’ASM peut savourer un succès mérité.
En possédant le deuxième meilleur effectif du Championnat de France, l’AS Monaco connait forcément une pression particulière. Une pression de résultat, mais également un devoir de contenu qui a terriblement manqué lors des dernières semaines. Éliminé par Rouen, une équipe de 3e division, en Coupe de France et décroché de la 2e place après plusieurs contres performances en Ligue 1, Monaco semble enfin retrouver des valeurs qui ont fait de ce club un mastodonte du Championnat de France. En s’imposant d’abord à Nice dans le derby, Monaco a montré que les idées de l’entraineur Hutter pouvaient être modifiées sans risquer une crise totale de résultat. Adi Hutter a opéré plusieurs changements, de gré ou de force peu importe, qui ont tous mené vers un aboutissement qui a été trouvé face à Lens ce dimanche après-midi.
En premier lieu, le repositionnement de Zakaria au milieu de terrain. Un choix extrêmement logique puisque le joueur est un milieu de terrain naturel, qu’il a toujours évolué au milieu de terrain dans ses précédents clubs que ce soit à Chelsea ou la Juventus. Double buteur face à Nice, dont une frappe sensationnelle dans la lucarne, Zakaria semble enfin s’épanouir dans un rôle qui lui convient parfaitement. Son ancien positionnement en tant que défenseur central était une erreur tactique grotesque, tant individuellement que collectivement.
Monaco a déjà du mal dans le secteur du milieu de terrain dans la conservation du ballon et la qualité technique, assez bas sur le terrain, et se priver d’un joueur aussi à l’aise avec la balle au pied que Zakaria était incompréhensible. Anomalie réparée depuis trois matchs désormais. Autre choix individuel, le changement de gardien entre Kohn et Majecki. Très bon en Coupe de France, malgré une élimination collective inquiétante, Majecki a profité du match catastrophique de Kohn face à Toulouse pour récupérer la place de numéro 1. Un choix cohérent, là encore validé sur le terrain puisque le gardien a été décisif face à Lens.
Les autres choix individuels vont de pair avec des choix collectifs forts. L’arrivée d’un nouvel adjoint (Damien Perrinelle) dans le staff de l’entraineur Adi Hutter ont certainement permis ces changements, pour un coach qui n’avait de toute façon plus les clés. Avec un attaquant face à Nice, et déjà une capacité à faire mal offensivement par son milieu de terrain, Monaco est passé à deux attaquants de pointe face à Lens. Balogun et Ben Yedder titulaires dans l’axe, Golovin et Minamino en soutien, Zakaria – Fofana au milieu de terrain, et une défense à 4 éléments au lieu de 5. Dans son ancienne idée, Hutter aurait fait jouer Magassa défenseur central à la place de l’un des quatre attaquants devant (Balogun – Ben Yedder – Golovin – Minamino).
Monaco retrouve son lustre d’antan
Le nouveau schéma n’empêche pas Minamino de redescendre très bas sur le terrain pour aider son équipe défensivement, ce qui en réalité est le travail défensif basique d’un ailier souvent oublié. Dans un football tourné vers les statistiques, vers le but et la passe décisive, et logiquement d’ailleurs, Minamino a prouvé qu’il était possible d’allier les deux. Performance également rendue possible grâce au positionnement de Singo, encore excellent face à Lens, dans un rôle de latéral droit qu’il connait bien. Capable de coller la ligne de touche pour élargir le jeu, capable de proposer offensivement dans son couloir pour amener un surnombre et libérer offensivement Minamino, Singo a prouvé qu’il était possible de jouer sans piston et d’avoir une organisation parfaitement cohérente.
Mieux, Monaco a réalisé une première période de très haut niveau. En se procurant cinq occasions nettes, l’ASM a confirmé que ce schéma tactique devait perdurer. Le club monégasque s’était perdu dans une quête d’équilibre global, sans jamais trouver la formule et en perdant le sens de son football historique. Toujours tourné vers l’avant, toujours tourné vers le but adverse, Monaco a renoué avec des principes tactiques qui ont fait les grandes heures de ce club. Un mastodonte du football français, finaliste de la Ligue des Champions, demi-finaliste de cette même compétition encore récemment et éliminé par l’arbitre face à la Juventus Turin, Monaco s’était embourbé dans un projet « Red Bull ». Un projet qui vise à chercher un équilibre d’ensemble, mais qui oublie parfois qu’une équipe possède des qualités supérieures dans un secteur de jeu en particulier. A Monaco, il s’agit des atouts offensifs et la performance de l’ASM face à Lens montre qu’il s’agit de la bonne direction à suivre.
Monaco n’a jamais été aussi dangereux que ce dimanche après-midi, dans un stade de Bollaert où très peu d’équipes vont gagner. Monaco a également montré des qualités mentales intéressantes, avec un avantage de deux buts qui a été comblé par l’adversaire. Loin de s’écrouler, l’ASM a alors remonté son bloc équipe à nouveau pour créer du danger et se procurer un penalty puis un but. Dans ce schéma, Monaco provoque quand il le veut, et c’est ici une force si précieuse. Si rare.
L’ASM va devoir confirmer sur la durée son renouveau, mais la matière première à disposition permet de croire à cela. Pour retrouver les sommets, Monaco va devoir retrouver des idées audacieuses, capables de rendre les lettres de noblesse à la Principauté. Avant de penser à la Ligue des Champions, avant de penser aux trophées nationaux, il est temps pour Monaco de prendre une nouvelle direction. Ce qui ne signifie pas forcément de changer radicalement de secteur sportif, mais en laissant une place à de nouvelles idées.
Emmanuel Trumer