Solide dauphin de Ligue 1, le RC Lens réalise une saison sensationnelle d’un point de vue comptable. Après la phase aller du Championnat de France et 19 matchs disputés, les Sang et Or sont à trois points seulement du leader parisien et comptent sept points d’avance sur Monaco (4e) et Rennes (5e). Un avenir européen est une ambition légitime pour un club qui a changé de statut.
Trois ans seulement après sa remontée en Ligue 1, le Racing Club de Lens n’a jamais été aussi proche de retrouver les soirées européennes. Après cinq années passées dans l’antichambre de la Ligue 1, entre difficultés financières et désillusions sportives, Lens connait aujourd’hui une période faste qui s’explique par différents facteurs. Sur le terrain et en dehors, le RCL est actuellement un club qui a trouvé une cohérence globale depuis l’intronisation de l’entraineur Franck Haise. Arrivé en cours d’exercice lors de la saison 2019-2020, en Ligue 2, il est celui qui a permis de retrouver l’élite.
Haise a remplacé un Montanier qui avait déjà permis de jouer le haut du tableau, mais dont certains choix individuels et tactiques ne permettaient pas d’envisager sereinement la montée à l’échelon supérieur. Haise a toujours eu une vision claire de ce qu’il voulait mettre en place, dans une approche particulièrement logique du football. C’est certainement l’une des plus grandes forces d’un entraineur qui arrive à parfaitement cerner le profil individuel des joueurs pour leur permettre d’être dans les meilleures dispositions au sein de son collectif. Plutôt pragmatique dans son approche tactique, Franck Haise a mis en place une équipe capable de fermer les espaces de sa moitié de terrain dans un premier temps.
Une idée particulièrement travaillée sans ballon, avec cinq défenseurs dont deux latéraux capables de se projeter haut et rapidement à la récupération du ballon. Lens est devenue une redoutable équipe de transition, capable d’aspirer son adversaire pour profiter des espaces laissés dans son dos ensuite grâce à un jeu direct. Une idée qui a porté ses fruits en Ligue 2 puisque la montée en Ligue 1 a été acquise quelques semaines après l’intronisation de Franck Haise, mais également à l’échelon supérieur où Lens est parvenu à se maintenir sans aucun souci. Mieux, le club nordiste s’est stabilisé dans la première moitié du classement, proche des places qualificatives pour la Coupe d’Europe. 7e lors de la saison 2020-2021, 7e également la saison dernière en 2021-2022, le RCL était aux portes d’un classement plus ambitieux encore.
Une équipe plus complète, qui doit encore faire des ajustements
Des performances honorables qui ont été bien analysées pour permettre de viser encore plus haut cette saison et d’être cette fois-ci un candidat crédible à la Ligue des Champions. Une donnée qui n’est toujours pas garantie, mais Lens fait désormais la course en tête au lieu de courir après les prétendants. Cette ambition plus élevée trouve ses racines dans un secteur sportif très performant, notamment au niveau du recrutement. Lens peut perdre un joueur titulaire de son équipe, comme Cheick Doucouré l’été dernier, l’analyse sur le remplacement est toujours parfaite.
Tel profil individuel, utilisé pour telles raisons est parti, il faut donc se pencher sur telle recrue pour continuer à évoluer de la même manière. Abdul Samed, en provenance de Clermont, s’est parfaitement intégré dans l’équipe titulaire et Lens n’a cessé de progresser avec des recrutements toujours plus judicieux. Brice Samba dans le but, Facundo Medina et Kevin Danso en défense centrale, Loïs Openda à la pointe de l’attaque, de jeunes joueurs très talentueux emmenés par un capitaine Seko Fofana qui est l’un des meilleurs et l’un des joueurs les plus complets du Championnat de France. C’est l’une des autres forces du Racing, qui en parallèle de sa montée en puissance sportive, de sa cohérence entre les différents secteurs sportifs, est parvenu à garder ses meilleurs éléments sur le terrain. Malgré des approches conséquentes, Seko Fofana a prolongé son contrat dans le Nord avec un beau salaire à la clé, et forcément les ambitions lensoises sont montées d’un cran.
Au-delà de cela, c’est dans le jeu et le contenu que le RCL a également évolué. C’est aujourd’hui une équipe plus complète, qui assume concrètement son changement de statut. D’une équipe tournée vers la projection rapide, Lens est devenue une équipe capable d’assurer une possession du ballon haut sur le terrain, dans la moitié de terrain adverse. Face à des adversaires regroupés, qui offrent peu d’espace dans leur camp, l’équipe de Franck Haise est parvenue à comprendre la nécessité de faire le jeu tout en acceptant l’idée d’être désormais celle qui va offrir des espaces dans son dos. Il reste encore des ajustements à faire dans cette nouvelle idée de jeu, avec une interrogation sur la viabilité de ce schéma tactique pour imposer une domination dans le jeu avec ballon comme ce fut le cas lors du dernier match face à Auxerre.
Le Racing Club de Lens est en tout cas aujourd’hui une équipe assez complète pour se mêler à la lutte européenne. Après avoir stabilisé Lens en Ligue 1, et peut-être après une qualification européenne, il sera certainement temps pour Franck Haise de tenter un défi encore plus grand. Dans une situation similaire à celle de Graham Potter, passé de Brighton à Chelsea, et dans la même idée de jeu, c’est tout de même un pari risqué. Les besoins tactiques ne sont pas les mêmes, les mises en place non plus, mais Franck Haise aura tout le loisir d’essayer s’il le souhaite.
Emmanuel Trumer