Avec deux trophées dans la poche et un titre en Premier League encore mathématiquement accessible, la saison des Reds est d’ores et déjà une réussite. Liverpool aura même atteint un niveau assez magnifique dans le jeu lors de la deuxième partie de saison, ce qui a permis à l’équipe de Jurgen Klopp de rattraper la quasi-totalité de son retard de points sur le rival de Manchester City. Des certitudes dans le jeu, des trophées dans les Coupes nationales, et la finale de la Ligue des Champions à disputer face au Real Madrid. Sur le papier, Liverpool est une équipe qui peut rêver de tout écraser l’an prochain mais doit avant tout être capable de franchir un nouveau palier pour suivre le rythme de Manchester City.
Le club entrainé par Jurgen Klopp est certainement aujourd’hui à l’apogée d’une histoire pourtant très riche, et si l’entraineur allemand a réussi à amener une vraie identité de jeu à cette équipe il bénéficie également d’une structure de très haut niveau. Liverpool se trompe peu sur le recrutement, les Reds sont sûrs de leur force et de leur système de jeu. Installé dans un 4-3-3 inamovible, Liverpool est exactement dans la même idée de jeu que son concurrent de Manchester City. Ce n’est d’ailleurs absolument pas une surprise si ce club est le seul à pouvoir concurrencer sportivement l’effectif de Manchester City. Pour Liverpool et Klopp, tout s’est construit à peu près de la même façon que lors de l’arrivée de Pep Guardiola à City. Le club a construit petit à petit une identité qui permet de produire ce jeu, par le schéma tactique donc, par les profils de joueurs recrutés qui collent parfaitement à ce système de jeu, et par la conviction d’y arriver grâce au contenu du jeu. Pari largement réussi, Liverpool est aujourd’hui un club surpuissant, riche financièrement et historiquement. C’est surtout un groupe qui a réussi à gagner la Premier League face à Manchester City et Pep Guardiola alors que tout le peuple Red attendait ce moment depuis 30 ans.
Une nouvelle preuve que le succès vient par le jeu, par les idées, et par une organisation millimétrée. Les latéraux (Robertson – Tsimikas à gauche et Alexander Arnold à droite) entrent parfaitement dans l’idée du schéma tactique, le milieu avec Fabinho – Thiago – Henderson également, et Naby Keita apporte lui sa capacité à changer le rythme d’un match grâce à ses courses et ses projections dans la moitié de terrain adverse. Les ailiers avec Mané et Salah ont très longtemps porté cette équipe, et l’arrivée récente de Luis Diaz est venu rebooster un secteur qui tournait un petit peu plus au ralenti. Une idée simple, bien animée, mais malheureusement souvent avec une longueur de retard sur le concurrent mancunien.
En réalité, Jurgen Klopp est un entraineur qui s’est toujours calqué sur le schéma du technicien catalan Pep Guardiola, et à ce jeu-là forcement c’est l’ancien du Barca qui a une longueur d’avance. Jamais Liverpool n’a eu l’idée de recruter un numéro 9, pensant longtemps que Firmino en était un, et continuant à penser que Mané pouvait être un attaquant de pointe. Liverpool pêche dans ce secteur et vient de se rendre compte que Manchester City avait pris le joueur le plus prometteur de la planète à ce poste avec Erling Haaland. La longueur d’avance, toujours. Quelles solutions s’offrent alors à Liverpool pour pouvoir continuer à concurrencer City sur tous les tableaux et notamment en Premier League où les Cityzens seront quasiment injouables l’année prochaine c’est une certitude. D’un point de vue personnel j’ai souvent lu ou entendu que l’attaque actuelle de Liverpool était absolument complète mais ces gens-là doivent regarder les matches avec des œillères puisque Liverpool a inscrit la bagatelle de 0 but dans les deux finales qu’elle a disputé cette saison. Et oui, Luis Diaz est un ailier, Sadio Mané aussi, Mohamed Salah également, et Firmino est un numéro 10. Jota peut faire illusion dans l’axe mais ce n’est pas sa position préférentielle non plus. Comme sonné par l’annonce de la signature de l’attaquant de pointe Erling Haaland à City, Klopp vient de comprendre qu’il lui faudra également certainement un apport dans ce secteur. Sans cette arrivée, il sera strictement impossible de remporter le titre en Premier League face à Manchester City la saison prochaine.
L’arrivée d’un buteur, une nécessité comme à City
L’idée n’est pas forcément de copier Manchester City et de prendre le même profil d’attaquant avec Erling Haaland, mais le besoin d’un joueur capable de finir les actions dans la surface, capable d’attirer sur lui un marquage qui va libérer des espaces pour ses partenaires (ses ailiers, et ses milieux qui se projettent vers l’avant), est un besoin absolument primordial pour les Reds. Cela passe peut-être par un départ dans le secteur offensif, avec Firmino ou Jota, mais l’apport d’un pur numéro 9 rendra cette équipe encore plus complète qu’elle ne l’est déjà. Le chemin est de toute façon tracé puisque City l’a fait. Toujours est-il que le manager actuel des Reds est Jurgen Klopp et l’entraineur allemand doit décider de la direction à donner à son équipe, sachant pertinemment que les renforts adverses l’obligent à avancer également et peut-être à modifier une philosophie de jeu. Klopp s’est toujours inscrit dans une idée de mobilité pour tous ses joueurs, préférant donc aligner un ailier ou un numéro 10 en pointe de son attaque. Liverpool a d’ailleurs raté Erling Haaland une première fois, ne sachant pas où le faire jouer. Le voilà aujourd’hui chez le premier concurrent. Perdre en mobilité n’est pas une tare, surtout si l’attaquant en question est également capable d’activer une activité à la perte du ballon. Dans une équipe qui souhaite conserver la maitrise c’est une obligation et c’est un travail de coach que de le faire comprendre à son joueur puis le mettre en œuvre. Tous les autres joueurs peuvent accepter de distribuer des ballons pour un attaquant, ce qui leur permettrait d’être décisif et de gagner, mais tous les autres joueurs n’acceptent pas de courir pour son voisin. C’est ici une nuance qu’il faut jauger, mais dans le football de plus haut niveau aujourd’hui il faut absolument pouvoir frapper avec différents atouts.
Les cartes dans la manche Red sont désormais trop stéréotypés, et sans un apport concret dans ce secteur je crains personnellement un écart plus important l’année prochaine. D’autant plus que City n’est pas le seul club à se renforcer, et finalement Liverpool pourrait se retrouver bon dernier des favoris avec une idée qui le retarde dans sa quête de trophées. Il ne s’agit en aucun cas de vouloir faire évoluer de manière drastique le travail mis en place, bien au contraire puisqu’il est excellent, mais de pouvoir apporter une touche supplémentaire qui fera de cet ensemble une équipe encore plus redoutable. L’arrivée d’un latéral droit pour suppléer Trent Alexander Arnold est également une nécessite, comme cela a été fait avec Tsimikas. Cela stimule la concurrence, offre plus d’options, et permet d’être compétitif sur tous les tableaux lors d’une saison.
Liverpool est un effectif armé dans tous les autres secteurs de jeu, et sera quoiqu’il arrive une équipe plaisante à regarder jouer. Le jeu est à la base des victoires, et c’est dans cette optique qu’il faut installer un projet. Exactement comme l’a fait Pep Guardiola, puis Jurgen Klopp. Cependant, le jeu seul ne peut permettre de tout gagner sans y amener une logique dans les profils et les postes. A la pointe de l’attaque des Reds, il réside encore une anomalie qui doit être corrigée.
Emmanuel Trumer