Lyon, la marche avant
Huitième de Ligue 1 à l’issue de la saison qui s’est achevée le week-end dernier, Lyon reste sur une série de victoires en toute fin de saison qui peut laisser tout de même présager un changement dans la philosophie de jeu, une évolution également dans la compréhension de la matière à disposition dans ce club lyonnais, et également une incapacité totale de la part de Peter Bosz d’assimiler des préceptes tactiques qu’il a critiqué en France.
Quelle était la philosophie de Peter Bosz, qui n’est plus donc ? Une défense à 5, des joueurs positionnés à des postes qui ne sont pas les leurs, et des résultats apocalyptiques. En deuxième partie de tableau de Ligue 1 pendant longtemps, dans la lignée d’un club de Leverkusen qu’il n’a jamais réussi à sublimer, Bosz a perdu tout contrôle sur un vestiaire qui a compris son incapacité. Longtemps, Peter Bosz a eu les excuses d’une instabilité chronique dans un club lyonnais qui a pour objectif répété de remporter une Coupe d’Europe avant le départ du Président historique Jean-Michel Aulas. C’est le rêve d’un homme qui a tout construit, qui a fait de ce club une institution et qui voit petit à petit sa matière maltraitée par des entraineurs successifs. Bruno Genesio, Rudi Garcia, et maintenant Peter Bosz, tous sont arrivésa avec l’idée qu’ils allaient rayonner grâce à leurs seules idées et non leurs joueurs.
Peter Bosz, lui, s’est en plus permis de critiquer un système français dont il ne comprend pas les rouages, et qui l’a emmené vers la 12e place de Ligue 1, avant une reprise en main nécessaire. Concrètement, le technicien allemand a emmené avec lui le même schéma tactique qui l’a vu évoluer à Leverkusen avec une défense à 5 éléments, trois défenseurs centraux, deux latéraux dans les couloirs, deux joueurs dans l’axe au milieu, puis deux joueurs en soutien d’un attaquant. En soutien d’une pointe serait mentir puisqu’il n’en a jamais utilisé de sa vie, et il a fallu une intervention divine pour que Moussa Dembélé trouve sa réelle place et son rythme de croisière : 17 buts personnels en 2022.
Puisque l’objectif du football n’est pas de faire briller un joueur mais bien une équipe entière et un club dans son ensemble, de mettre chaque élément dans sa meilleure position, et d’obtenir des victoires au tableau d’affichage, le changement tactique opéré s’est traduit par cinq victoires lors des derniers matches, avec une seule et unique défaite causée par l’expulsion de Thiago Mendes. Pas anodin puisque ce dernier a longtemps été positionné en défense centrale par son entraîneur, cocasse pour un milieu de terrain et un choix catastrophique. Bosz a estimé que ses défenseurs centraux n’étaient pas assez bons, alors un milieu de terrain aurait certainement l’affaire. Dans son esprit et uniquement là-dedans puisque les résultats ont été horribles.
Lyon, une culture footballistique à retrouver
Même constat pour Lucas Paqueta, un milieu de terrain et numéro 10 de génie positionné seul à la pointe de l’attaque. Moussa Dembélé n’était pas assez fort techniquement, pas capable de jouer en remise, tout cela était une grande mascarade puisque cela a été prouvé par les résultats. Le changement s’est traduit par un schéma collectif en 4-4-2 plus proche d’un 4-2-3-1. Paqueta a été positionné en soutien d’une pointe avec Dembélé, Caqueret évolue plus bas au milieu de terrain avec Mendes ou Aouar, et Toko Ekambi – Faivre se partagent les couloirs. Emerson et Gusto ont retrouvé leur poste de latéral dans une défense à 4 à plat et Lyon s’est remis à gagner des matches. Sans les idées d’un coach totalement dépassé, uniquement adroit lorsqu’il s’agit de garder son calme devant les médias. Un point positif direz-vous, mais est-ce là le football ? Aujourd’hui certainement, c’est l’impression laissée.
C’est un des points abordés par Jean-Michel Aulas dans son bilan de fin de saison dressé aux supporters via une lettre publique, et le Président a parfaitement raison lorsqu’il évoque une philosophie perdue. Lyon, c’est un centre de formation unique avec une capacité à attirer tous les meilleurs jeunes de la région, un stade flambant neuf, une attractivité immense grâce à la ville, mais surtout la volonté de créer le jeu. De le produire, de forcer les choses, et de pratiquer un football attrayant. Un football attrayant n’est pas obligatoirement synonyme de victoire, mais lorsque l’OL a suivi ce précepte il a gagné des titres. Le foot est logique, vouloir le déformer et d’une prétention inouïe. Peter Bosz a même prononcé cette phrase : « Les joueurs français manquent de culture tactique » et il faut lui souhaiter beaucoup de courage dans un effectif français, qui souhaite le rester, et qui ne compte pas sur Peter Bosz pour installer ses concepts allemands qui ne lui ont jamais permis de gagner en Bundesliga ou même en Coupe d’Allemagne.
Peter Bosz est à l’opposé de ce que devrait être le football moderne, il est dépassé. Avec un schéma non adapté à son environnement, des joueurs qui évoluent contre leur gré à des postes qui ne sont les leurs, Bosz est tout de même parvenu à prouver qu’il pouvait déléguer le pouvoir des choix tactiques pour se concentrer sur un rôle d’intendant qui lui convient bien mieux. Aujourd’hui et depuis quelques semaines déjà, Lyon a retrouvé une identité de jeu, une volonté de marquer, et cela se traduit par tous les scores et tous les tableaux d’affichage, c’est ici l’avantage non négligeable du football : toutes les idées peuvent paraîtres romantiques sur le papier, celles qui gagnent sont celles qui restent. Jean-Michel Aulas s’est rendu compte des problèmes en cours de saison, mais la pression mise publiquement pour un nouveau coach n’est pas la solution adéquate pour un vestiaire qui peut perdre toute motivation. Laurent Blanc était une piste et le reste si le technicien allemand est amené à repartir dans des idées tactiques qui ne fonctionnent pas, mais il faudra agir directement et ne pas jouer sur des journalistes qui se font un plaisir de détruire un entraineur étranger pour une mauvaise prononciation de la langue.
Ici il s’agit uniquement de constater les choix tactiques, les choix de profils individuels, l’adaptation face aux adversaires, et l’innovation. Uniquement cela et c’est important car un entraineur peut faire du bon boulot d’où qu’il vienne. Bientôt il faudra peut-etre se tourner vers Koh Lanta pour avoir des idées.
Emmanuel Trumer